Le Groupe ADF a sécurisé son activité de soudage en équipant l’ensemble de ses ateliers d’une affûteuse automatisée entièrement sécurisée. Initiée en région PACA, cette action de prévention gagne sur tous les tableaux : sécurité, santé, environnement, qualité et productivité.

Le Groupe ADF emploie 4000 salariés dans le monde. Le siège est à Vitrolles. 800 collaborateurs travaillent autour de l’étang de Berre, dans des métiers très diversifiés. Environ 75 postes de soudage sont répartis sur 5 sites : atelier de chaudronnerie de La Feuillane à Fos (40 postes), atelier de tuyauteries à Rognac (20 postes), ateliers de Cadenet et de Marseille-Provence à Vitrolles (12 postes) et atelier du Carré d’As à Martigues (3 postes), auxquels s’ajoutent des ateliers de métallurgie et travaux de proximité. Les principaux clients en PACA sont : ArcelorMittal, Ineos, LyondellBasell, KemOne, Exxon, et Airbus Helicopters.

Pour Philippe Dumond, directeur corporate HSE & Radioprotection, « la santé et la sécurité au travail sont devenues une préoccupation majeure au sein du Groupe ADF. L’innovation technique permet de répondre à certaines problématiques. Dans un environnement industriel où l’état d’intégrité – « la bonne santé » - des pièces et structures fabriquées est caractérisée par différents contrôles non destructifs très stricts, en particulier en tuyauterie, dans la pétrochimie et le nucléaire, chaque évolution, technique ou organisationnelle, doit également respecter la productivité de l’outil industriel et les normes en vigueur. »

Les risques liés aux fumées de soudage : L’exposition des salariés aux fumées de soudage peut générer des maladies professionnelles graves. Elles contiennent notamment des particules et des oxydes métalliques susceptibles d’atteindre le poumon profond. Les électrodes en tungstène contenant du thorium sont faiblement radioactives. Cette substance est classée cancérogène par le CIRC.

Fumées de soudage : substitution des tungstènes thoriés

n28 bp photo1Jean Caporali, contrôleur de sécurité à la Carsat Sud-Est, a visité l’entreprise en 2014 dans le cadre du plan d’action national sur la réduction d’exposition des soudeurs aux fumées de soudage. « 139 entreprises étaient ciblées en région PACA. Chez ADF, lors des opérations de soudage selon le procédé TIG, les soudeurs utilisaient des électrodes en tungstène contenant du thorium. Notre première préconisation a porté sur la substitution de ce produit, en atelier et sur chantier. »

Dès 2014, le Groupe ADF a substitué l'oxyde de thorium (marqué WT) par des électrodes en tungstène contenant :

  • des oxydes de lanthane (marqué WL),
  • des oxydes de cérium (WC),
  • E3.

Bon à savoir : la réglementation impose la substitution lorsque cela est techniquement possible. Pour en savoir plus, consultez la fiche INRS d’aide à la substitution FAS 20 (lien en fin d’article).

Jean-Baptiste Moingeon, coordinateur Hygiène Industrielle et Suivi Santé du Groupe : « La substitution par des électrodes sans thorium a été relayée sur tous nos sites de production. L’utilisation de tungstènes thoriés est interdite dans l’ensemble des ateliers de soudage. Cette consigne de sécurité a été mise à jour dans le Document Unique du Groupe ADF. »

Cette action s’inscrit dans une démarche plus globale qui vise à réduire l’exposition des salariés aux fumées de soudage. ADF travaille en partenariat avec l’entreprise CLS (Comptoirs Lyonnais de Soudage), « notamment pour la mise en place de bras d’aspiration aux postes de soudage, précise M. Moingeon. Le responsable de l’agence CLS de Martigues, Stéfan Zdravkovic, m’a signalé l’existence sur le marché d’une machine très intéressante : une affûteuse sécurisée. Elle permet de supprimer les risques de coupures et d’inhalation de poussières, deux risques identifiés sur lesquels le groupe ADF cherche à progresser depuis plusieurs années. »

Affûtage des électrodes : attention aux poussières et aux coupures

« C’est au moment de l’affûtage que les risques d’exposition sont les plus élevés », indique Jean Caporali. Dans le métier, l’affûtage de l’électrode se fait souvent avec une meuleuse d’angle ou un touret. « Non seulement le soudeur inhale des poussières nocives, mais en plus, il y a des risques de coupures, de vibrations, voire de perforation. »

Lors des interventions en extérieur sur chantier, les risques sont multipliés. Plus dangereuses, les meuleuses portatives génèrent des postures contraignantes et peuvent entraîner des risques d’éjection (effet rebond en cas de blocage du disque). Il y a rarement un support pour poser le matériel. Les bras du soudeur encaissent toutes les vibrations.

La problématique du bruit doit également être prise en compte pour préserver la santé auditive des soudeurs et supprimer toute exposition à des niveaux de bruit supérieurs aux limites recommandées.

La solution : une affûteuse sécurisée pour électrodes en tungstène

n28 bp photo2En 2015, Jean-Baptiste Moingeon a contacté Marc Cassagnabère, le responsable commercial du fabricant Inelco Grinders, une entreprise danoise. « Dans un premier temps, nous avons testé ces affûteuses en local avec les collaborateurs d’ADF sur la région PACA. Après validation, nous les avons déployées dans toutes nos agences au niveau national. »

Le principe : un affûtage automatique à froid

À l’aide d’une pince-électrode, le soudeur place l’électrode dans le porte-électrode. Très précis, le réglage de la longueur de l’électrode se fait au serrage.

Lors de la mise en marche de l’affûteuse, le soudeur n’a plus aucun contact, ni avec l’électrode, ni avec le disque de la meule.

Le liquide de refroidissement, associé à une rotation élevée du disque de diamant, assure un affûtage de qualité (avec surface polie et égale de l’électrode). Les propriétés de l’électrode sont conservées (elle ne rougit plus par surchauffe).

Lorsque l’affûteuse est complètement éteinte, on peut alors retirer le porte-électrode : l’électrode est affûtée. Les poussières nocives sont confinées dans un réceptacle contenant du liquide de refroidissement.

n28 bp photo3Existe en 3 modèles :

  • Affûteuse d’atelier fixe avec coupe d’électrode : Ultima-Tig / Cut, 2 500€ HT à l’unité.
  • Affûteuse d’atelier fixe, sans la coupe : Ultima-Tig, 1 800€ HT à l’unité.
  • Affûteuse portative : Neutrix, 745€ HT à l’unité. En cas d’intervention sur chantier, il est possible de la fixer sur un établi à l’aide d’un support spécifique.

n28 bp photo4Les gains

  • Sécurisation de l’affûtage et de la coupe. Le soudeur est protégé.
  • Affûtage et coupe de haute qualité : centrage parfait de la pointe, choix de l´angle, coupe précise de l’électrode à la longueur voulue, sans risque d’effritement.
  • Une bonne acceptation par les soudeurs : ce matériel s’adapte à l’activité. Fixé sur une servante, il ne prend pas de place. La prise en main est quasi immédiate.
  • Un gain économique. Cette machine génère des économies sur la consommation de tungstènes. Le réaffûtage de chutes d’électrodes est possible, jusqu´à 8 mm. « Le retour sur investissement est de 18 mois » d’après Gwenaël Le Floch, service Achats, groupe ADF.

PAROLE DU PROFESSIONNEL « Simple d’utilisation, cette technique permet de maintenir un haut niveau de qualité tout en assurant la protection des opérateurs. Elle répond aux besoins d’ADF sur l’ensemble du spectre : sécurité, santé, environnement, qualité et productivité. » Jean-Baptiste Moingeon, coordinateur Hygiène Industrielle et Suivi Santé, groupe ADF

Démonstration : Oussine est soudeur depuis 10 ans chez ADF. Il a commencé comme intérimaire et travaille désormais à l’atelier de tuyauterie du Carré d’As à Martigues. Cette affûteuse lui a changé la vie. « La coupe est très précise, l’affûtage plus rapide. On ne s’écorche plus les doigts ! »

Une mise en œuvre efficace et un déploiement rapide

n28 bp photo5Pour Philippe Dumond, « cette démarche a été mise en œuvre de manière pragmatique au sein du Groupe. En plus d’une bonne appropriation avec les collaborateurs, les axes de compétitivité ont été démontrés ; le partenariat a par ailleurs très bien fonctionné entre les collaborateurs d’ADF, le distributeur CLS et le fabricant Inelco Grinders… Ce retour d’expérience va nous servir à sécuriser l’ensemble de nos activités dans le cadre de notre développement international. »

  • 2014 : évaluation des risques dans le Groupe. Démarche de substitution des tungstènes thoriés.
  • 2015 : découverte des affûteuses sécurisées. Rencontre avec le fabricant danois Inelco pour une première évaluation du dispositif.
  • Présentation à la Direction du Groupe ADF. Décision est prise d’expérimenter ce matériel à un niveau local.
  • Expérimentations pilotes à Berre l’Étang : implication des opérationnels, tests auprès des soudeurs. Le fabricant Inelco et le distributeur CLS accompagnent ADF dans les agences locales (La Feuillane, Rognac, Berre Martigues et Carré d’As) pour présenter le matériel aux responsables opérationnels, experts soudage et soudeurs.
  • Validation par les opérateurs et les instances représentatives du personnel. Estimation des besoins au niveau national par agence, avec accompagnement du fabricant et du distributeur.
  • 2016 : déploiement dans toutes les agences du Groupe ADF en France et dans sa filiale belge au port de Gand (ADF TIB).

Marc Cassagnabère (Inelco Grinders) : « C’est rare de voir une telle collaboration avec un client. Notre relation a été très professionnelle du début à la fin. »

En France, tous les ateliers de production du Groupe ADF sont désormais équipés d’affûteuses sécurisées, soit 200 collaborateurs concernés pour un investissement total dans 30 affûteuses : 18 affûteuses fixes en atelier et 12 affûteuses portatives pour les chantiers. L’affûtage à l’aide d’une meuleuse est interdit dans les ateliers du Groupe ADF. La consigne a été mise à jour dans le DUER du Groupe ADF.

PAROLE DU PROFESSIONNEL « Cette action est une réussite collective. Visible, très concrète et aboutie, elle va nous permettre de lancer de nouvelles actions de prévention sur ce même principe de déploiement. » Philippe Dumond, directeur HSE & Radioprotection, Groupe ADF

Formation / sensibilisation

Laurent Fina, contrôleur de sécurité au Laboratoire Inter Régional de Chimie (LIRC) de la Carsat Sud-Est, apporte des conseils techniques pour le captage des fumées de soudage, tels que des recommandations concernant les bras aspirants flexibles sur chaque poste de travail, avec lampe intégrée ; cagoules ventilées pour les interventions sur chantiers… Récemment, il a présenté un module de sensibilisation aux risques liés aux fumées de soudage. Tous les types de profils d’ADF étaient présents : soudeurs, chefs d’équipe, chefs d’atelier, ainsi que des responsables d’activité et des représentants du service qualité soudage. La diffusion d’un support a permis le partage d’informations avec les référents métiers en interne.

Caractéristiques techniques de l´affûteuse Ultima-Tig / Cut

Dimensions de l´électrode: Ø0,8 - 4 mm

Coupe : jusqu´à 8 mm minimum

Longueur minimale (affûtage): 15 mm en standard (8 mm avec pinces spéciales)

Angles d´affûtage : 7,5° - 90° (correspondant à un angle de pointe de 15° à 180°)

Le kit standard comprend :

  • Une affûteuse avec coupe incluant la table, le disque de diamant et le liquide lubrifiant
  • Un porte-électrode
  • Pinces électrodes pour l’affûtage et la coupe d’électrodes de Ø1,6, Ø2,4 et Ø3,2

En savoir plus :

Thorium : fiche d’aide à la substitution FAS 20, INRS, 2008.

Fumées de soudage et techniques connexes, INRS, 2012.